LAVENDER STORM (2017)Peinture de Larissa Egner.
Provence : passer de Dante à Cézanne et Van Gogh
Le charme de la Provence peut être décrit par des mots, des poèmes, parfois de la musique, ainsi que par le moyen muet, mais certainement percutant et très expressif, de la peinture, teintée des couleurs d'une terre embrassée par le soleil, colorée par la lavande et embellie par le sel de mer. En commençant par le verbe écrit, je présente cette région du sud-est de la France, baignée par la mer Méditerranée, qui s'étend de la rive gauche du Rhône inférieur à l'ouest, presque jusqu'à la frontière avec l'Italie, comme un centre d'intérêt historique et artistique important, car elle a non seulement accueilli des colonies grecques, mais a également connu un processus intense de romanisation, qui a favorisé, à l'époque médiévale qui s'en est suivie le développement d'une civilisation raffinée, dont l'apogée se situe au tournant des XIIe et XIIIe siècles, période dont la renommée lui vaut d'être mentionnée par Dante Alighieri, qui évoque le poète provençal Arnaut Daniel, lequel, très respecté par les Toscans, a eu le privilège de pouvoir s'exprimer dans sa langue maternelle, l'occitan, dans le Purgatoire de Dante. Enfin, l'histoire écrite sur cette région de France se termine par l'évocation des souvenirs de carte postale les plus typiques que nous offre ce lieu, certainement embelli par le parfum et la couleur de sa lavande la plus typique, une plante qui, avec les paysages époustouflants du littoral et le patrimoine historico-artistique, fait de la Provence l'une des grandes destinations du tourisme international. Remettant à une autre occasion la description poétique du lieu susmentionné, je procède à une double citation : "Ici, la lumière du soleil est si intense qu'il me semble que les silhouettes des objets ne sont pas seulement noires et blanches, mais aussi bleues, rouges, brunes et violettes" et "Je me plonge chaque jour dans le paysage, les beautés que je vois rendent mes journées plus agréables que n'importe où ailleurs", des mots prononcés par le célèbre maître Cézanne, résumant les raisons pour lesquelles d'autres artistes, tels que Van Gogh, Matisse, Chagall, Picasso, Klee et d'autres, ont également choisi la Provence comme lieu de prédilection pour leur pratique de la peinture.
"SOIRÉE LAVANDE" (2021)Peinture de Margarita Kovalenko.
JAMAIS DEUX SANS TROIS… (2020)Peinture d'Olivier Messas.
La Provence de Cézanne et Van Gogh
La relation entre la région française et l'art s'est concrétisée dans les recherches figuratives de Cézanne et de Van Gogh, artistes dans l'œuvre desquels les images d'Aix-en-Provence, d'Arles et de Saint-Rémy-de-Provence apparaissent souvent. En commençant par l'aîné des deux peintres, Cézanne est certainement connu pour ses multiples représentations de la Montagne de Sainte Victoire (Aix-en-Provence), un massif montagneux dont la représentation retrace non seulement les caractéristiques de la Provence, mais aussi l'évolution stylistique de son créateur, qui est progressivement parvenu à ce type de décomposition des figures en formes géométriques solides, ainsi qu'à l'interpénétration de plans tranchants, qui caractérisent le courant cubiste ultérieur. Ce qui vient d'être dit peut être constaté en comparant quatre œuvres différentes représentant le sujet naturaliste susmentionné, à savoir : la montagne Sainte-Victoire et le viaduc de la vallée de l'Arc (1882-85), la montagne Sainte-Victoire avec un grand pin (1887), la montagne Sainte-Victoire (1904-1906), la montagne Sainte-Victoire (1905-1906). Dans ces chefs-d'œuvre, le massif montagneux est toujours immortalisé en contre-plongée et à distance, c'est-à-dire d'un point de vue qui permet au maître d'isoler la luminosité de la montagne, une "silhouette" qui se dématérialise progressivement avec le paysage environnant, pour culminer dans le dernier chef-d'œuvre cité plus haut, dans lequel l'artiste procède à la simplification du rendu de la donnée naturelle, réalisée au moyen de volumes décomposés, qui apparaissent comme des tesselles chromatiques disposées les unes à côté des autres, qui, seulement lorsqu'elles sont placées côte à côte, sont capables de constituer une image reconnaissable. Si j'ai confié à Cézanne le soin de décrire Aix-en-Provence, Van Gogh peut se charger de synthétiser l'atmosphère de Saint-Rémy-de-Provence à travers des chefs-d'œuvre du calibre de La Nuit étoilée, tandis que son récit d'Arles sera confié à l'analyse de trois œuvres moins populaires, que j'ai choisies précisément pour vous les faire connaître. La première est La moisson, une huile sur toile de 1888, qui raconte la vie rurale à Arles, décrite à travers la représentation d'un champ de blé, déjà partiellement moissonné, avec une bande de tiges dorées adossées à la clôture qui délimite une zone de végétation, tandis qu'à divers endroits les agriculteurs sont au travail sous l'intense soleil provençal, dans un ciel clair qui permet de voir les montagnes à l'horizon. D'autre part, le pont de Trinquetaille (1888), chef-d'œuvre qui immortalise l'infrastructure métallique et anguleuse du même nom, qui traversait le Rhône pour unir les deux rives de la ville française, choisie par le maître hollandais pour sa tranquillité, en raison d'une réduction sensible du trafic commercial sur ledit fleuve, suite au développement ultérieur du réseau ferroviaire. En conclusion, La cour intérieure de l'hôpital d'Arles (1889) nous raconte, du moins en partie, la "vie sociale" de Vincent à Arles, en immortalisant une partie de l'Hôtel-Dieu, lieu où Van Gogh fut hospitalisé de force entre décembre 1888 et mai 1889, à la suite de la plus célèbre coupure d'oreille de l'histoire de l'art. Enfin, décrivant brièvement le chef-d'œuvre, elle dépeint la cour susmentionnée avec une foule de détails, dont la présence d'une fontaine ronde autour de laquelle des parterres de fleurs ont été peints, ainsi que quelques arbres aux branches tordues et un chemin de terre, séparant le jardin des portiques de l'hôpital. Dans cet espace, "la vie sociale d'Arles" est réalisée par la représentation de la présence de certains patients, désireux de se promener sous le portique ou sur les balcons. Le récit iconique qui relie Cézanne et Van Gogh à la Provence se poursuit dans les œuvres des artistes d'Artmajeur, comme celles de Jacques Peyrelevade, Sergio Lanna et Mirek Kuzniar.
VUE SUR LA MER DEPUIS LES TOITS DU CAP D'ANTIBES (2022)Peinture de Jiel.
SAINTE VICTOIRE (2023)Peinture de Jacques Peyrelevade.
Jacques Peyrelevade: Sainte Victoire
Le peintre provençal Peyrelevade, en représentant le sujet de la Montagne de Sainte Victoire, se place en dialogue direct avec la plus haute tradition de l'art, puisqu'il cite Cézanne, se présentant comme une sorte d'élève contemporain du célèbre maître français. En effet, le peintre expressionniste d'Artmajeur, dont l'œuvre s'attache principalement à représenter la Provence, mais aussi Marseille, la Méditerranée et l'Orient, est intimement convaincu qu'il ne peut y avoir d'artiste qui n'ait pas assimilé, même à un niveau inconscient, l'influence des représentants les plus célèbres du monde de l'art, finissant même par reproposer, en certaines occasions, certains expédients stylistiques, techniques ou thématiques spécifiques. En tout cas, bien que le massif de la Sainte Victoire ait été "volé" au pinceau de Cézanne, la technique artistique proposée par Peyrelevade s'avère plus proche de celle de certains maîtres provençaux, reconnus par le peintre lui-même dans les figures de Monticelli, Jean-Baptiste Olive, Marquet, Camoin, Verdilhan, Seyssaud, Ambrogiani, Toncini, etc. Pourtant, il est possible, grâce justement au sujet, de comparer le tableau de l'artiste d'Artmajeur à l'une des versions les plus " réalistes " du massif par Cézanne, comme celle intitulée Mont Sainte-Victoire vu de Bellevue (1885), dans laquelle, de même, les couleurs génèrent un clair-obscur lourd et peu travaillé, qui se pose sur les rochers et les flancs de la colline. Certes, sujet, ombres et cadrage mis à part, les couleurs fauves utilisées par Peyrelevade se distinguent nettement de la leçon de Cézanne, visant à animer un sujet qui, bien que largement exploité par l'histoire de l'art, a retrouvé une nouvelle vie et un nouvel intérêt pictural.
VINCENT AT HOME (VINCENT MODEL N. 02) (2023)Peinture de Sergio Lanna (Sir Joe).
Sergio Lanna : Vincent à la maison
Vincent van Gogh, La chambre de Vincent à Arles (1888) : ce chef-d'œuvre de l'histoire de l'art représente une chambre meublée simplement, avec un lit simple en bois sur le côté droit, flanqué d'une chaise, et une petite table avec des objets quotidiens sur le côté gauche, surmontée d'une fenêtre. Le mur de la pièce, en revanche, est enrichi non seulement par la présence de quelques vêtements suspendus, mais aussi par les couleurs de divers tableaux et d'un miroir. Le premier plan de la toile est occupé par le bout du lit et une chaise, le tout enfermé dans des murs bleus, où l'on distingue clairement deux portes. Il faut préciser que ce qui vient d'être décrit est l'aspect de la chambre à coucher de Vincent, située à la Maison Jaune d'Arles, où le maître hollandais s'est réfugié en 1888, malade de l'alcool et souffrant d'une toux. Quoi qu'il en soit, une partie de l'histoire de la vie de Vincent dans la ville provençale est rendue reconnaissable par la vision du tableau d'Artmajeur, qui représente le maître dans sa chambre, habillé comme s'il était prêt à partir, probablement pour se rendre sur la place du Forum, l'endroit représenté dans Café Terrace in the Evening, le chef-d'œuvre du peintre hollandais daté de 1888. Dans cette dernière toile, le centre-ville est éclairé par des étoiles et des lampes à gaz, sources de lumière qui illuminent les traits d'un café, resplendissant de jaune et d'orange, prêt à accueillir des tables rondes et des chaises, où l'on peut imaginer que Vincent a l'intention de faire quelques croquis, tout en soulageant les douleurs de son âme avec un bon verre.
ARLES, SCÈNE DE VILLE (2020)Peinture de Mirek Kuzniar.
Mirek Kuzniar : Arles, scène de ville
Nous avons parlé du paysage, de l'hôpital, de la chambre, du pont et des paysages de campagne d'Arles, mais nous ne nous sommes pas encore attardés sur les citoyens d'Arles qui, dans le tableau post-impressionniste coloré de l'artiste d'Artmajeur Mirek Kuzniar, semblent marcher timidement au loin, tandis qu'une rue pleine d'enseignes et de drapeaux s'impose. Pour voir un plus grand dynamisme de la figure humaine, il faut se référer à un autre chef-d'œuvre de l'histoire de l'art, je veux parler des Spectateurs dans les arènes (1888) de Van Gogh, une œuvre dans laquelle le maître a représenté un ancien théâtre de tauromachie, tellement bondé que le public devient le véritable protagoniste de la toile. Dans ce contexte, les chercheurs ont même émis l'hypothèse que de nombreuses connaissances de l'artiste semblent animer le décor, à tel point qu'il serait possible de reconnaître ses traits dans d'autres tableaux de la même époque. Par conséquent, les points focaux du tableau semblent être les postures et les gestes de ces derniers, tandis que la scène, d'importance secondaire, est représentée dans le coin supérieur droit, une position où l'on peut également apercevoir des silhouettes de toreros. Quoi qu'il en soit, c'est vers la tache jaune qui apparaît dans le coin supérieur droit, l'arène, que se trouvent tous ces gens, réunis par une fête qui prend l'aspect de couleurs contrastées, destinées à accentuer le sentiment de vivacité inhérent à l'événement banal.