Caprie

VOUS AVEZ DIT PSYCHOTIQUE?

A LA HONTE DU PSYCHOTIQUE

Le psychotique a honte...
Déjà tout petit. Car il sent quelque chose en lui dont il n'a pas de quoi être fier qui le distingue au bord de l'animal.
Il regarde une souffrance que tous ne possèdent pas.
Il est prudent, se cache, se tait de peur de l'incongru.
Il n'a jamais le sentiment d'être un être humain, il craint la mort et tout autant la nargue, la defie.

Il prie pour qu'on lui rende ce qui lui manque et c'est ainsi qu'il découvre l'autre dimension.
Elle l'abandonne et le prend selon ses rages.
Et les autres qui ne connaissent pas encore le mot "psychotique" s'attachent à lui et à ses oracles qui les étonnent.
Parce qu'il n'a pas besoin de vivre pour mériter d'entendre la vie. Il voit au travers.
Il souffre la douleur de l'enfant, de l'adolescent, de l'adulte, et parfois, quand il n'a pas peur, il peut mettre des mots ou des images dessus.

Il est gentil parce qu'il a souvent peur, encore; car le pire ennemi d'un psychotique, c'est lui même.
Le psychotique est un Indien qui met une plume sur la croix des catholiques, sur l'étoile des Juifs, sur le dôme des musulmans. On l'arrache, c'est fou.

Le psychotique est malade, comme son nom veut l'indiquer et en tant que tel, il semble parfois préférable de le retirer du monde.

Dedans il y a un mort, des morts qui ne veulent pas mourir et qu'il ne veut pas faire mourir car c'est la seule chose qui lui rappelle qu'en tout il y a une fin.
Alors émerge la nécessité d'être droit, même plié en deux de souffrance, droit, encore et toujours...

Le psychotique est plus seul qu'un arbre, d'une solitude que ne peut l'imaginer qui ne l'est pas.
Alors il s'accroche comme un animal sans maître, invente l'amour - on le croirait érotomane - depuis tout petit. L'amour comme pour les oiseaux, puis l'amour pour les êtres humains.
Il donnera tout pour en recueillir les miettes, cela suffira. Simplement.
Car il est si peu en estime de lui-même qu'il ne peut qu'avancer ainsi.

Le psychotique voudrait guérir, il souffre trop. Et on se pose la question de savoir si c'est possible.
Il sait, lui, que ça l'est. Mais abandonnerait-il la crainte de lui, son savoir secret, son indulgence permanente, sa vérité? Pour être en vie sans doute, oui.
Il apprendra à nouveau les gestes qui ouvrent le cœur, il reapprendra les gestes du monde, ceux qui vous font se fondre dans le monde, mais il tentera toujours de ne pas oublier, il restera toujours quelque chose. Un psychotique.