Paul Gauguin, Nature morte avec trois chiots, 1888. Huile sur bois, 91,8 x 62,6 cm. Maman.
Le genre de la nature morte : plongeons-nous dedans !
Allons droit au but : lorsque vous lisez des informations sur la nature morte sur le web, vous pourrez trouver des exemples des époques hellénistique, romaine, médiévale et de la Renaissance. Ils se caractérisent par la prédominance de la représentation de sujets inanimés, à la fois naturels et artificiels. Malgré ces caractéristiques définissantes de ce type de composition, il est officiellement devenu un genre distinct, reconnu, spécialisé et valorisé seulement à la fin du XVIe siècle. L'histoire se poursuit avec une popularité significative et une diffusion au siècle suivant, bien qu'au XVIIIe siècle, la nature morte ait été reléguée au bas de la hiérarchie des types d'art figuratif. Néanmoins, la notoriété progressive acquise par le genre est principalement attribuée à l'exemple flamand entre les XVIe et XVIIe siècles, un contexte dans lequel le terme "stilleven" a été inventé, ce qui signifie littéralement "nature immobile". Alors que le sens initial a été conservé dans les langues anglaises, il n'en va pas de même dans les langues néo-latines, où le mot "immobile" a été remplacé par "mort" (par exemple, "natura morta"). Ce changement résulte d'une réinterprétation italienne du terme, qui a eu lieu à la fin du XVIIIe siècle, probablement en raison d'une simple erreur de traduction, modifiant la phrase néerlandaise plus ancienne. À ce stade, le récit se poursuit dans mon classement, démontrant le succès d'un genre souvent sous-estimé mais effectivement abordé par des maîtres immortels de chaque mouvement artistique, tendance et courant.
Caravage, Corbeille de fruits, 1597-1600. Huile sur toile, 46×64 cm. Pinacothèque Ambrosienne, Milan.
1.Caravage : Corbeille de fruits (1600)
Commençons par l'une des œuvres les plus célèbres de l'histoire de l'art, appartenant au "malheureux" genre de la nature morte. Je fais référence, pour commencer avec une montée d'adrénaline et une tendance au syndrome de Stendhal, à La Corbeille de fruits de Caravage, un chef-d'œuvre datant de 1600. Le tableau est important à la fois d'un point de vue historique et artistique et en termes de sujet. Ce n'est pas seulement l'un des premiers exemples du genre artistique de la nature morte, mais il représente également, en accord avec l'esthétique italienne du réalisme, non seulement des fruits immaculés, mais aussi une pomme pourrie et des feuilles sèches criblées de trous causés par les insectes. Tout cela a été conçu par le maître pour évoquer la précarité de l'existence humaine, mais aussi pour célébrer l'authentique imperfection de la nature. Cela inclut un panier en osier tressé, qui, au centre de la composition, contient des grappes de raisins, des poires, des pommes, des figues et des pêches, reposant sur une surface en bois qui court parallèlement au regard du spectateur. Le spectateur ne peut se concentrer que sur le réalisme du sujet, qui est en réalité nié par la présence de certains détails. En fait, avez-vous remarqué que, de manière assez incroyable, le peintre a accompli la mission impossible de placer des fruits de différentes saisons côte à côte ? Enfin, je tiens également à justifier le choix du sujet par Caravage, qui, dans un contexte tardivement maniériste, se sentait justifié d'exprimer son intérêt pour la nature, souvent précédemment utilisée comme un simple élément de fond dans la portraiture ou les thèmes religieux.
Rembrandt, Le Boeuf écorché, 1655. Huile sur panneau. 95,5 x 68,8 cm. Persienne, Paris.
2.Rembrandt : Le Boeuf écorché (1655)
Nous continuons avec la tachycardie, les vertiges, la confusion et les hallucinations du syndrome de Stendhal, car nous nous approchons d'un chef-d'œuvre riche en significations symboliques, visant à témoigner de la manière dont entre les XVIe et XVIIe siècles, les compositions de nature morte ont triomphé, parmi elles, celles dans lesquelles apparaissaient des carcasses d'animaux, à comprendre comme des memento mori lugubres et directs, capables également d'exercer les artistes qui abordaient la complexité de la forme et de la couleur. Cependant, le Bœuf égorgé de Rembrandt, un chef-d'œuvre représentant la carcasse en quartiers d'un animal suspendue par ses deux pattes arrière, attachées à une poutre en bois, nous rappelle également le célèbre exemple de la Crucifixion de Jésus. Nous en sommes maintenant arrivés à un moment critique de la description, car l'œuvre représente en réalité une fausse nature morte. En effet, la présence d'une femme à l'arrière-plan, qui apparaît derrière une porte entrouverte, transforme le tableau en une peinture de genre, tout entière destinée à représenter une scène de la vie quotidienne.
Chaim Soutine, Carcasse de bœuf, 1925. Huile sur toile, 147,32 x 113,03 cm. Collection de l'Institut d'art de Minneapolis.
3.Chaim Soutine : Carcasse de Boeuf (1925)
Pour transformer ce qui précède en une véritable nature morte, Chaim Soutine est venu à la rescousse ! Je fais référence à sa Carcasse de bœuf de 1925, inspirée en réalité par le chef-d'œuvre décrit précédemment, qui a été réinterprété dans une série d'œuvres du même sujet par le maître russe. Il est à noter, cependant, que d'autres grands maîtres, dont Daumier et Slevogt, ont abordé le même thème, bien que dans le cas de Soutine, une interprétation particulièrement émotionnelle est évidente, caractérisée par des couleurs intenses et saturées qui reflètent la personnalité excentrique du peintre. Permettez-moi de m'attarder brièvement sur cet aspect caractéristique de l'artiste pour révéler quelques détails sombres sur son exécution des natures mortes d'animaux en question. Soutine, ami des employés d'une boucherie parisienne, achetait de la viande auprès d'eux et la ramenait dans son atelier pour la peindre pendant des semaines, période pendant laquelle elle subissait également une décomposition malodorante... Nous ne savons pas si cette fixation sur le monde animal découlait d'une privation initiale, car on sait que l'artiste, lorsqu'il était encore pauvre, évitait d'acheter de la viande parce qu'elle était trop chère. Paradoxalement, une fois devenu riche, il décida de l'acheter uniquement pour l'étudier et la peindre...
Vincent van Gogh, Les Tournesols, 1888. Huile sur toile, 92,2 cm × 73 cm. Galerie nationale, Londres.
4.Vincent van Gogh : Les Tournesols (1888)
Le regard du spectateur est fixé sur le seul sujet représenté dans la nature morte en question : un bouquet de tournesols disposé dans un vase, leurs formes reposant sur une surface jaune, prêts à se détacher d'un mur de couleur claire. Les tournesols, récoltés à différents stades de maturité, apparaissent de manière similaire dans une série de sept œuvres de l'artiste, conçues pour décorer la chambre à Arles que van Gogh avait destinée à son ami et collègue Gauguin. Permettez-moi de m'attarder un moment sur le mot "ami", révélant qu'en réalité, l'artiste français a contacté Vincent uniquement après avoir été financièrement compensé par Theo van Gogh. Mais pourquoi y avait-il besoin d'argent ? Eh bien, disons que Gauguin imaginait déjà que vivre avec Vincent serait un peu problématique, et il n'aimait pas non plus la province méditerranéenne mentionnée. En tout cas, Paul s'est débarrassé de son ami peu de temps après, suite à l'une des disputes les plus célèbres de l'histoire de l'art, quittant Arles et déclenchant une crise d'automutilation chez van Gogh, culminant dans l'incident tragique et emblématique de la coupe d'oreille. Revenant aux fleurs, il est également connu que les tournesols dans les différentes compositions varient en nombre, allant de quatorze à quinze spécimens. Pourquoi ce choix particulier ? Vincent tenait le nombre 14 en haute estime car il se référait au nombre d'apôtres, tandis qu'avec 15, il s'incluait lui-même dans la même référence (14 apôtres + Vincent). Ironie : ce top dix parle d'événements qu'il vaut mieux ne pas tenter chez soi !
Paul Gauguin, Nature morte avec trois chiots, 1888. Huile sur bois, 91,8 x 62,6 cm. Maman.
5.Paul Gauguin : Nature morte avec trois chiots (1888)
En tant que défenseur des droits des animaux que je suis, je me devais de compenser la présence, dans ce top 10, d'êtres vivants décédés, un but que j'atteins en parlant de Nature morte de Gauguin avec trois chiots, une œuvre qui, en même temps, soulève mes doutes. En effet, si nous parlons de nature morte, comment, en fait, les animaux pourraient-ils même être vivants ? Si nous devons être fidèles aux postulats du genre, la faune peinte devrait en réalité être morte, et les vivants ne seraient acceptables que s'ils étaient fabriqués à partir de modèles décédés. Nous savons cependant que dans le contexte figuratif dans lequel Gauguin se trouvait en train de travailler, il était désormais assez libre de ce genre de limitation plus ancienne, à tel point qu'au moment de la réalisation de Nature morte avec trois chiots, il vivait en Bretagne avec un groupe d'artistes expérimentaux. C'est précisément avec ces derniers qu'il s'est éloigné des représentations plus réalistes, aboutissant, à certaines occasions, à des caractéristiques stylistiques ayant une saveur partiellement abstraite, résultant de l'union qu'il préconisait entre le rêve et la nature. En tout cas, un composant décisif du chef-d'œuvre est également l'interprétation particulière des caractéristiques stylistiques de l'art japonais, que l'on trouve, par exemple, dans la délimitation en bleu des corps des chiots, ainsi que dans le motif de leur pelage, destiné à rappeler celui de la nappe imprimée.
Paul Cézanne, Nature morte aux pommes et aux oranges, 1899. Huile sur toile, 74×93 cm. Musée d'Orsay, Paris.
6.Paul Cézanne : Pommes et oranges (1899)
Nous voilà, en train de décrire une autre des œuvres les plus populaires du genre : pourquoi ai-je dit ce que j'ai dit ? Eh bien, il est important de savoir que dans Nature morte aux pommes et aux oranges, de nombreux historiens de l'art ont reconnu un précurseur du cubisme, car il utilise des formes géométriques pour représenter les fruits, en plus de la présence de lignes brisées dans les plis du tissu. Explorons maintenant ce qui avait été anticipé : sur une toile, plusieurs pommes et oranges sont disposées, certaines éparpillées, d'autres rassemblées sur des assiettes, qui, sur le côté droit du support, sont également accompagnées de la présence d'une cruche. Ladite toile repose sur un tissu floral, destiné à mettre en évidence la présence des couleurs complémentaires bleu et orange. Plongeons maintenant dans cet aspect chromatique du chef-d'œuvre, entièrement axé sur la description de ses objets à l'aide de variations tonales, qui, dans le cas des fruits, vont du jaune au rouge. La vue de ces couleurs n'est pas offerte depuis une perspective qui adhère aux règles géométriques, car l'espace est le résultat du chevauchement de volumes très simples, vus d'un point de vue élevé.
Frida Kahlo, Viva la Vida, 1954. Musée Frida Kahlo. @danielharoro
7.Frida Kahlo : Viva la Vida (1954)
L'importance et l'icône de l'œuvre en question seront révélées au cours du récit, mais pour l'instant, je veux vous donner un aperçu en vous disant que j'ai choisi cette peinture pour démontrer le potentiel du genre de la nature morte, qui est tout aussi capable de véhiculer des messages très positifs et porteurs d'espoir. Cependant, ce que je viens de mentionner découle d'un fort contraste, un élément récurrent dans l'œuvre de Frida. Dans ce cas, la dualité est due au fait que l'artiste a peint ce chef-d'œuvre dans un état de santé grave, mais elle a représenté des pastèques, le symbole par excellence de la vivacité de la vie. Lorsque nous observons de près ces sujets, cependant, nous remarquons qu'ils traversent différentes étapes de maturation, très probablement en référence aux différentes étapes de la vie humaine. En tout cas, l'optimisme se propage grâce à l'utilisation du rouge, associé à la couleur complémentaire verte de la peau du fruit, un aspect chromatique qui crée un contraste agréable et vibrant. Enfin, les intentions de la peintre, jusqu'alors seulement spéculées, deviennent claires dans la pastèque inférieure, qui porte la phrase : "Viva la Vida - Coyoacán 1954 Mexico". À mesure que le récit sur la peinture se conclut, il en va de même pour celui sur Frida, car Viva la Vida est, à tous égards, la dernière œuvre créée par l'artiste...
Salvador Dalí, Nature morte vivante, 1956. Huile sur toile, 125 cm × 160 cm. Musée Salvador Dalí, Saint-Pétersbourg, Floride.@
artprecietheday
8.Salvador Dalí : Nature morte vivante (1956)
En revanche, la curieuse association entre le dynamisme et la nature morte intervient dans le chef-d'œuvre de Salvador Dali, intitulé "Living Still Life," réalisé en 1956 pendant la période que le Catalan appelait "Nuclear Mysticism," un moment pictural où il cherchait à explorer la relation entre l'esprit conscient et la physique quantique. Comment puis-je essayer d'expliquer cela de manière simple ? Eh bien, Dali, en créant le chef-d'œuvre en question, s'est inspiré, en faisant appel à son esprit conscient, en se remémorant l'exemple de Van Schooten, rendu par sa nature morte "Table with Food." En parlant de physique, elle entre en jeu lorsque le maître transforme le décor de table hollandais, lui donnant le miracle du mouvement, à interpréter, bien sûr, de manière parfaitement surréaliste. Par conséquent, le genre généralement statique de la nature morte devient, selon le titre, vivant ! L'existence est, dans ce cas spécifique, attestée par le mouvement des objets, réductible, dans leur plus petite composante, à des particules atomiques. À travers ces dernières, nous arrivons au concept générateur de la peinture, le "Nuclear Mysticism" mentionné précédemment, inspiré de manière indissoluble par la sinistre et terrifiante bombe atomique larguée par les États-Unis sur le Japon.
Andy Warhol, Campbell's Soup Cans, 1962. Peinture polymère synthétique sur toile, 51 cm × 41 cm. Musée d'art moderne.
9.Andy Warhol : Campbell's Soup Cans (1962)
Les 32 sérigraphies identiques, inspirées de l'emballage de la soupe Campbell, répètent délibérément le sujet en question, dans le but de créer une installation qui reproduit l'agencement en série typique des produits de supermarché. Le thème, interprété plusieurs fois par l'artiste, a été pour la première fois représenté dans le chef-d'œuvre en question, qui visait également à évoquer la présence constante de la soupe dans la vie des Américains de l'époque. Pensez donc qu'Andy lui-même, une fois l'œuvre terminée, a avoué avoir mangé le produit à plusieurs reprises pendant vingt ans ! De plus, à travers l'omniprésence de l'image en question, il a également remis en question l'idée de la peinture en tant que moyen d'invention et d'originalité, car la nature sérielle des "Campbell's Soup Cans" est due à l'utilisation d'une technique de sérigraphie semi-mécanisée. Cependant, il y a une inexactitude dans tout ce que j'ai écrit : pouvez-vous la trouver ? Je plaisante, mais je tiens à préciser que les boîtes de soupe ne sont pas, comme annoncé ci-dessus, identiques les unes aux autres, car chaque tableau représente une réplique d'un modèle original avec quelques détails distinctifs appliqués. À ce stade, Andy a-t-il involontairement mis en lumière ces caractéristiques particulières qui rendent même les objets industriels uniques ?
Giorgio Morandi, Nature morte, 1949. Collection privée.
10.Giorgio Morandi : Nature morte (1950)
Plusieurs objets ménagers sont regroupés presque au centre du tableau, où ils reposent sur une surface indéfinie, se détachant sur un fond de nuances similaires mais plus claires. Quelle est la raison du choix d'immortaliser quelques objets simplement disposés ? Pour répondre, nous devons remonter aux années 1940 et 1950, une période pendant laquelle le peintre a opté pour ce type de composition afin de se concentrer davantage sur l'analyse de la technique picturale. Toujours dans cette optique, ses natures mortes sont devenues moins "fantaisistes", car elles représentaient principalement les mêmes sujets, notamment des bouteilles, des pichets, des vases et des bols. Alors, qu'est-ce qui distinguait chaque œuvre des autres ? Le format, le point de vue et la lumière ! En effet, Morandi se concentrait sur de légères variations de ton, bien qu'il préférait utiliser des nuances de gris, d'ivoire et de blanc, sans oublier d'opposer des couleurs saturées comme l'orange, le rose et le bleu. Quelles autres constantes peuvent être ajoutées à son travail ? Le peintre avait l'habitude de peindre avec ses coups de pinceau gommés caractéristiques, visant à créer des visions douces aux limites "fluctuantes". Cette caractéristique est due au fait que la lumière vive éclaircit les ombres, qui, avec les sources lumineuses, sont rendues à l'aide de champs de couleur bidimensionnels qui ont tendance à dématérialiser efficacement les objets !