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Serge Assaf

Retour à la liste Ajouté le 3 févr. 2022

DANS LE SOLEIL LEVANT


Comme une ombre chinoise dans le soleil levant, un halo de brume soulignant ses contours. Sa silhouette aérienne à la démarche féline se meut avec aisance dans mon horizon de ce matin de janvier.
Je ne vois qu’elle tant elle occupe l’espace. Pourtant, autour, toute une vie se met en place et les bruits de la rue se mélangent aux chants des oiseaux. Les odeurs matinales de la terre que l’astre roi réchauffe, se mêlent à celles du quotidien des hommes. Les effluves de café et les aromes de pain côtoient celles des galettes au thym et au sésame.
L’invitation au « petit déjeuner » est immédiate !
Je m’assoie devant une belle tasse de café Libanais, prêt à déguster une galette avec quelques olives et du fromage frais tout en regardant le monde vivre autour de moi. Une musique douce de flûte orientale vient souligner cet instant magique. J’aime cette manière de démarrer la journée. Dès la première gorgée, mon esprit s’envole pour nager dans l’océan de souvenirs qui me ramène à mon père, installé avec mon angélique mère devant la cafetière fumante qui embaumait l’espace. C’était un rituel quotidien que je partageais avec eux à chaque occasion. Mais mon esprit est vite rappelé à la réalité car la silhouette mystérieuse réapparaît soudain ! Je ne peux à nouveau détacher mon regard de cette nymphe. Je suis happé, dépendant de chaque mouvement de son corps, de chaque direction qu’elle va prendre. Je suis ensorcelé, enveloppé, envoûté, en attente. Je suis en espoir de découvrir son visage enfin. De voir quel est ce charme qui vient en un instant d’enchaîner mon quotidien, de codifier ma vie, de changer mes priorités.
Le soleil est maintenant plus haut dans le ciel et comme un immense projecteur qu’un suiveur céleste manipule, il la met en lumière, agrandissant et propulsant son ombre loin devant elle. Je ne distingue pas encore ses traits, pas plus que je ne le peux de ses vêtements. Je ne vois que les contours d’une robe légère qu’une brise taquine fait onduler dans le mouvement merveilleux de sa démarche portée par de hauts talons. Et voici qu’elle disparaît à nouveau, cachée par la foule de gens qui remontent l’avenue pour se rendre à la gare. Une grande frustration me gagne alors. Il m’est tout à coup pénible de ne plus la voir. Elle me manque déjà alors que je ne sais rien d’elle, pas même son visage. Je la cherche dans le mouvement d’humains essayant de distinguer sa silhouette mais je ne la retrouve pas. Je ne la reconnais dans aucune personne que je peux voir de près ou de loin.
L’aurais-je perdue pour toujours ?
Comment a-t-elle pu disparaître aussi vite ?
J’avale une autre gorgée de café, il est froid. Combien de temps suis-je resté a attendre qu’elle réapparaisse, je ne saurais le dire. Ce que je sais c’est que je suis là, hagard à me demander si je n’ai pas rêvé.
Je réalise soudain que je suis tombé immédiatement amoureux d’un mirage. Un mirage sans visage et pourtant un mirage que je suis certain de reconnaître entre mille s’il m’est donné un jour la chance de la revoir.

Depuis ce jour, chaque matin je reviens et m’installe au même endroit espérant qu’enfin un jour…

…Comme une ombre chinoise dans le soleil levant, un halo de brume soulignant ses contours. Sa silhouette aérienne à la démarche féline se meuve avec aisance dans mon horizon.

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Serge ASSAF
27/01/2022 Voir moins

Artmajeur

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